[JO2024] L’impact des Jeux Olympiques sur l'activité physique de la population française

 
Publié le 23/04/2024 - Mis à jour le 24/04/2024
Matthieu Casteran

Les Jeux Olympiques, souvent célébrés comme des catalyseurs de l'engagement sportif et de la santé publique, suscitent un vif intérêt quant à leur impact sur les habitudes physiques des citoyens. Le gouvernement a embrassé cette opportunité avec l'objectif d'encourager la population française à être plus active. Quelles ont été les mesures mises en place pour atteindre cet objectif à l’aube de cet événement international ? Des voix se sont élevées remettant en cause la priorité accordée au sport dans l’agenda national, des critiques notamment formulées par des athlètes de haut niveau.

Pour évoquer ce sujet, Factuel est allé à la rencontre de Matthieu Casteran qui est Maître de Conférences à la Faculté des Sciences du Sport de Nancy, chercheur au Laboratoire Développement, Adaptation et Handicap (DevAH) et chercheur associé au Laboratoire Lorrain de Psychologie et Neurosciences de la dynamique des comportements (2LPN).

Quels sont les objectifs du gouvernement français attendus en matière d'activité physique grâce à l'impulsion des Jeux Olympiques ? Et quelles ont été les principales mesures mises en place pour les réaliser ?

Mathieu Casteran :"Le comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024 a développé, en parallèle de leurs mises en place, plusieurs programmes afin que ceux-ci deviennent une « vitrine de la promotion du Sport » et afin de bâtir l’« Héritage » des Jeux de Paris 2024. Le Gouvernement a choisi la promotion de l’activité physique et sportive comme la Grande cause nationale de l’année 2024. Le programme « Impact 2024 » doté de 50 millions d’euros permet des investissements pour des projets soutenant et renforçant le rôle social du « Sport » lors d’actions pour l’éducation, l'insertion professionnelle, l’engagement citoyen, l’inclusion, la solidarité, l’égalité, l’environnement, le bien-être et la santé.

Par exemple, les établissements scolaires et universitaires peuvent être labélisés « génération 2024 » afin de renforcer les liens entre le sport et l’éducation. En parallèle, nous avons déjà tous entendu parler du programme des « 30min d’activité physique quotidienne » qui ambitionne d’initier les enfants aux comportements actifs et d’avoir une Ecole promotrice de santé. Ce programme a été étendu à l’ensemble de la population avec « Bouge 30 minutes chaque jour » qui souhaite mettre en avant l’ensemble des bénéfices pour le bien-être et la santé par la limitation des comportements sédentaires et le respect des recommandations internationales en termes d’activité physique. De nombreux médecins et chercheurs se sont alarmés, à juste titre, du niveau actuel de la population française, et particulièrement du niveau des capacités physiques et du temps de comportements sédentaires des enfants.

Le programme « Impact 2024 » permet aussi la création, la rénovation et le réaménagement d’installations sportives de proximité en lien avec les collectivités territoriales, associations et acteurs du monde sportif. Le comité d’organisation des JOP souhaite que ces Jeux soient un accélérateur du développement sportif territorial en lien avec les stratégies d’aménagement des équipements sportifs. Un des exemples est celui de la rénovation et du développement d’infrastructures aquatiques devant permettre davantage d’accessibilité pour accroître le « savoir nager » en lien avec le programme « 1, 2, 3 Nager ! ». Des bassins mobiles ont aussi été mis en place dont un financé par le programme de l’édition 2023 à Nancy dans le cadre du projet « Savoir Nager au Grand Nancy ».

Les programmes sont nombreux et variés, mais avec toujours comme objectif le développement de la pratique d’activité physique. En résumé, faire « bouger » les Français est l’enjeux public principal pour cette année."

Pouvez-vous nous indiquer quelles ont été les principales critiques émises sur la place du sport dans la société française ? Quel est votre avis à ce sujet ?

Mathieu Casteran : "Depuis l’annonce des JOP à Paris en 2024, il y a un… plusieurs débats sur ceux-ci concernant l’économie, l’environnement, les moyens donnés aux athlètes pour performer, la santé...

D’un point de vue Santé, depuis la crise sanitaire de 2020, les Français ont augmenté leur temps de pratique d’activité physique avec comme objectif principal d’améliorer leur santé (INJEP), mais nous sommes encore loin d’avoir une société qui a intégré ces comportements de santé. Le Dr. Michel Cymes, animateur télévision et ambassadeur santé de JOP de Paris 2024, rappelle dans une tribune récente (mars 2024) qu’à l’échelle mondiale la France est classée 119ème sur 146 pays en termes de pratique physique (le 1er pays étant le pays avec les adolescents les plus actifs) et dit que « nous devrions avoir honte ». Il a lancé un appel aux médecins dans une tribune : « pas question de culpabiliser nos patients, mais informons-les sur les dangers d’un mode de vie inactif et trop sédentaire ; et conseillons-les pour l’améliorer » co-signée, par exemple, par le Pr. François Carré et la Pr. Martine Duclos. Les changements de comportement (passer de sédentaire à actif) prennent du temps et nécessitent un accompagnement. C’est en ce sens qu’il faudra continuer, après « Paris 2024 », les actions initiées et ne pas tout stopper car « c’est fini les JOP » ...

D’un point de vue Performance, nous avons récemment entendu Florent Manaudou et Teddy Riner s’exprimer sur le manque de reconnaissance pour le sport en France et remettant en cause la qualité de la préparation offerte aux athlètes pour les JOP.  Le premier confiant « aux JO de Paris 2024, on aura des beaux résultats parce qu’on est à la maison, mais on n’est pas un pays de sport » et le second « Oui, la France n'est pas un pays de sport. […] Allez au Brésil ! Là-bas, matin, midi, soir, ils font du sport, c'est vital. Nous, on commence à comprendre ». Les plans et programmes mis en place dans le cadre des JOP 2024 afin de répondre à l’objectif de terminer dans le Top 5 des nations en nombre de médailles sont-ils suffisants et ont-ils été mis en place suffisamment tôt ? … Nous verrons cela en Juillet."

Vous êtes le superviseur du club Orion Human-Interact, comment celui-ci s’inscrit dans ces questionnements en lien avec les Jeux Olympiques et le « Sport » en général ?

Mathieu Casteran : "Le club ORION Etudiants-Chercheurs « Human-Interact » regroupe des doctorants provenant de diverses thématiques (Sciences du sport, Ergonomie, Psychologie, Electronique, Santé…) au sein de 6 laboratoires de l’Université de Lorraine (2LPN, Loria, DevAH, Perseus, INSPIIRE et LCOMS) et souhaitant découvrir/coupler des compétences transverses à leurs thématiques principales. Trois grands axes sont mis en avant :

  1. Handicap et Vieillissement
  2. Sport et Performance
  3. Entreprise et Industrie du Futur

L’ensemble de ces thématiques sont abordées à l’aide de diverses fenêtres d’études (seules ou couplées) – par exemple, nous pouvons citer « la Santé – l’Ergonomie – les Comportements – la Performance – la Blessure – les Technologies » qui sont des thèmes transverses.

Certains doctorants réalisent leurs thèses en lien avec le projet PROSCeSS qui a pour objectifs de promouvoir la santé dans les clubs de sport et de les accompagner à devenir des milieux de vie promoteurs de santé. Aurélie Van Hoye, Maîtresse de Conférences de l’Université de Lorraine (UMR INSPIIRE – UFR STAPS Nancy) est une des actrices de ce projet. D’autres étudiants (doctorant et master - 2LPN et DevAH) étudient les liens entre le mouvement, le vieillissement et des capacités cognitives spécifiques. Enfin, des doctorants (DevAH – CARE) travaillent sur le côté performance avec des sportifs tant d’un point de vue des capacités physiques, biomécanique et de l’utilisation de certains matériels.

En ce sens, le club ORION Human-Interact, ouvert à tous les étudiants à partir du BAC+2, participe au côté performance des athlètes, mais aussi au développement de la santé par la pratique physique."